L’administration peut exécuter une décision de justice par des « mesures au moins équivalentes »

Le juge de l’exécution ne peut remettre en cause les mesures décidées par le juge du fond pour assurer l’exécution de sa décision.  Le Conseil d’Etat précise que la décision peut toutefois être exécutée par “des mesures au moins équivalentes” à celles qui ont été enjointes (CE, 27 mars 2023, n°452354).

 

Comment l’exécution des décisions du juge administratif est-elle assurée ? 

Pour assurer l’exécution de ses décisions, le juge administratif peut assortir ses décisions d’injonction et d’astreinte (articles L.911-3 et L.911-4 du CJA).

Exemple : un refus de permis de construire est annulé : le juge enjoint à la collectivité de délivrer le permis dans un certain délai, le cas échéant sous astreinte

Si la décision est exécutée dans le délai prévu, il n’y aura pas lieu de liquider l’astreinte (CE, 16 juin 1997, n°116809).

En revanche, si la décision n’est pas exécutée ou l’est tardivement, il convient de saisir à nouveau le juge administratif (le juge de l’exécution) pour obtenir la liquidation de l’astreinte (article L.911-7 du CJA).

La liquidation pourra présenter un caractère provisoire ou définitif. 

Il convient de bien distinguer l’astreinte provisoire de la liquidation provisoire. 

L’astreinte présente en principe un caractère provisoire (article L.911-6 CJA), ce qui signifie que son montant peut toujours être modulé, voire supprimé, par le juge de l’exécution (article L.911-7 du CJA). Le juge tient notamment compte des diligences accomplies par l’administration pour exécuter la décision pour décider de moduler ou non l’astreinte (CE, 3 décembre. 2015, n°394333).

Si l’astreinte est définitive, elle n’a plus qu’à être liquidée, sans aucune modulation, sauf si l’inexécution de la décision est due à un cas fortuit ou de force majeure (article L.911-7 du CJA).

La liquidation peut ensuite être provisoire, c’est-à-dire faite pour le temps écoulé dans lequel la décision n’a pas été exécutée, alors que la décision du juge administratif n’est toujours pas exécutée au jour de la liquidation. 

La liquidation est définitive lorsque l’exécution a eu lieu et qu’il n’y a plus lieu à liquidation provisoire. 

Il peut donc y avoir plusieurs liquidations provisoires jusqu’à ce que la décision soit exécutée. Interviendra alors la liquidation définitive. 

La liquidation provisoire ne peut toutefois pas être remise en cause lors de la liquidation définitive (CE, 23 octobre 2009, Bodier, n°310379).

Quand une décision du juge administratif est-elle exécutée ? 

Par une décision du 27 mars 2023 (n°452354), le Conseil d’Etat précise les conditions dans lesquelles une décision du juge administratif peut être considérée comme étant ou non exécutée. 

Elle l’est en principe lorsque l’administration a pris les mesures ordonnées par le juge du fond. 

Le Conseil d’Etat rappelle à ce sujet que le juge de l’exécution ne peut “remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l’exécution est demandée” (en ce sens : CE, 3 mai 2004, Magnat, n°250730).

Les mesures ordonnées au titre de l’injonction ne peuvent donc être remises en cause. 

Le Conseil d’Etat précise toutefois que la décision peut être exécutée par “des mesures au moins équivalentes” à celles qui ont été enjointes : 

“3. Si le juge de l’exécution saisi, sur le fondement des dispositions de l’article L. 911-7 du code de justice administrative, aux fins de liquidation d’une astreinte précédemment prononcée peut la modérer ou la supprimer, même en cas d’inexécution constatée, compte tenu notamment des diligences accomplies par l’administration en vue de procéder à l’exécution de la chose jugée, il n’a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l’exécution est demandée. Toutefois, si l’administration justifie avoir adopté, en lieu et place des mesures provisoires ordonnées par le juge des référés, des mesures au moins équivalentes à celles qu’il lui a été enjoint de prendre, le juge de l’exécution peut, compte tenu des diligences ainsi accomplies, constater que l’ordonnance du juge des référés a été exécutée.”.

L’administration dispose donc d’une marge de manœuvre dans le choix des diligences à accomplir pour assurer l’exécution des décisions du juge administratif. 

En pratique, cette solution ne vaut toutefois pas lorsque l’administration se trouve en situation de compétence liée, par exemple s’il lui est enjoint de délivrer une autorisation bien précise. 

 

Axel Bertrand, avocat associé

Le Guide juridique du ZAN

Recevoir le Guide

Le ZAN : enjeux majeurs et échéances