Suite à la loi n°2023-656 du 25 juillet 2023, l’ordonnance n°2023-870 du 13 septembre 2023 prévoit trois séries de mesures destinées à accélérer ou à faciliter la reconstruction et la réfection des bâtiments affectés par les émeutes de l’été 2023.
La loi n°2023-656 du 25 juillet 2023 relative à l’accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 avait autorisé le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, dans les trois mois, trois séries de mesures destinées à accélérer ou à faciliter la reconstruction ou la réfection des bâtiments affectés par les émeutes de l’été 2023 (article 1er de la loi du 25 juillet 2023).
Champ d’application
Sur le plan matériel, les bâtiments concernés sont ceux qui ont été “dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023” (article 1er de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
Les bâtiments publics et privés sont donc concernés, puisque, comme le souligne le rapport au Président de la République sur ce texte, les dégâts concernent “le bâti, public et privé, dont des services publics et commerces”.
Sur le plan temporel, seules sont concernées les demandes d’autorisation d’urbanisme déposées dans les 18 mois à compter du 15 septembre 2023 (article 8 de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
Droit de reconstruire à l’identique
La première mesure concerne la reconstruction ou la réfection à l’identique des bâtiments susévoqués.
L’ordonnance autorise leur reconstruction ou leur réfection à l’identique dans les conditions de droit commun, plus précisément aux conditions prévues par l’article L.111-15 du code de l’urbanisme, sous réserve des dispositions prévues par l’ordonnance par exception (article 1er de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
Comme en droit commun, les dispositions de l’ordonnance du 13 septembre 2023 ne dispensent d’abord pas de solliciter une autorisation d’urbanisme (CE, 20 février 2002, Plan, n°235725).
Ensuite, là aussi comme en droit commun (CE, avis, 23 février 2005, Mme Hutin, n°271270 ; Rép. Min. Logement JO ASN 21/08/2002 page 472, QE n°65052 JO ASN 06/08/2001 page 4468), le bâtiment doit avoir été régulièrement édifié. Ce qui suppose qu’il ait été édifié conformément à une autorisation d’urbanisme devenue définitive ou avant l’institution des autorisations d’urbanisme (article 2 I. de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
Il semble de plus qu’il puisse être fait échec à ce droit en cas de risque pour la sécurité publique.
L’ordonnance (article 2 III.) prévoit que le droit de reconstruire à l’identique s’exerce “dans les limites des règles applicables en matière de risques naturels, technologiques ou miniers auxquelles la reconstruction ou la réfection ne peut contrevenir et, le cas échéant, sous réserve des prescriptions de sécurité dont l’autorité compétente peut assortir le permis.”
De manière plus générale, en l’absence de disposition contraire sur ce point dans l’ordonnance, il semble qu’il pourrait être fait opposition au droit de reconstruire à l’identique en présence “d’un risque certain et prévisible de nature à mettre gravement en danger leur sécurité”, comme c’est le cas en droit commun (CE, avis, 23 février 2005, précité ; pour un PPRN : CE 17 décembre 2008, Falcoz, n°305409).
Contrairement au droit de reconstruire à l’identique prévu par l’article L.111-15 du code de l’urbanisme (CE, 23 novembre 2005, Commune de Bagnères-de-Bigorre, n°279721), les documents d’urbanisme ne peuvent en revanche pas y faire échec (article 2 I. de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
L’ordonnance autorise enfin des modifications de faible importance et ne se limite pas à un droit de reconstruire à l’identique “strict”.
Des modifications peuvent être apportées au bâtiment reconstruit, à condition qu’elles se limitent à une diminution ou une augmentation de 5 % de son gabarit initial. Elles peuvent de plus dépasser ce seuil si les modifications sont justifiées par « un objectif d’amélioration de la performance énergétique, d’accessibilité ou de sécurité« , à proportion des modifications du bâtiment nécessaires à la réalisation du ou des objectifs invoqués. En revanche, ces modifications ne peuvent avoir pour effet de modifier la destination ou la sous-destination initiale du bâtiment (article 2 II. de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
Engagement des opérations et travaux préliminaires
La deuxième mesure concerne l’engagement des opérations et travaux préliminaires de chantier.
L’ordonnance autorise le démarrage des opérations et travaux de démolition, de terrassement, de fondation dès le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme (article 3 de l’ordonnance du 13 septembre 2023), sans attendre la délivrance de l’autorisation.
Instruction et délivrance des autorisations d’urbanisme
La troisième mesure concerne l’instruction et la délivrance des autorisations d’urbanisme.
Côté pétitionnaires, les demandes déposées doivent préciser que le projet est soumis aux dispositions de l’ordonnance et les modifications apportées au bâti initial doivent faire l’objet “d’une motivation spécifique” (article 4 de l’ordonnance du 13 septembre 2023).
Le pétitionnaire doit afficher le récépissé de dépôt sur le terrain “de manière visible” (même article).
Côté instruction, plusieurs dispositions ont été prises, ayant pour objectif de réduire assez fortement les délais d’instruction (article 5 de l’ordonnance du 13 septembre 2023) :
- le délai d’instruction est raccourci à 1 mois pour les permis de construire, d’aménager ou de démolir et 15 jours pour les déclarations préalables ;
- le délai pour demander une pièce manquante est réduit à seulement 5 jours à compter de la réception du dossier ;
- les majorations ou prolongation du délai d’instruction de la demande d’urbanisme découlant de l’application de règles de délivrance prévues par d’autres législations que celle de l’urbanisme sont limitées à 15 jours à compter de la réception du dossier ;
- lorsque les travaux sont subordonnés à une procédure préalable de participation du public du public (prévue par l’article L.123-19 du code de l’environnement) la majoration du délai d’instruction est limitée à 45 jours ;
- les avis, accords ou autorisations requis sont adressés à l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme dans un délai de 15 jours à compter de la réception du dossier, sans quoi le silence gardé passé ce délai vaut avis favorable ou acceptation tacite ;
- lorsque la réalisation des travaux requiert l’accomplissement préalable d’une procédure de participation du public, l’autorité compétente peut recourir à la procédure de participation par voie électronique prévue par l’article L.123-19 du code de l’environnement et exempter le projet d’enquête publique.