Asten logo neomorph blanc

Présomption d’urgence en cas de mise en demeure prescrivant la démolition de constructions irrégulières

11
/
12
/
2023
par
Axel Bertrand
Chapitres

Le mécanisme de mise en demeure en cas de travaux irréguliers


La loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (loi n°2019-1461,
article 48) a créé un mécanisme de mise en demeure sous astreinte complémentaire aux poursuites pénales qui peuvent être exercées en cas d’infraction pénale d’urbanisme (articles L.481-1 à L.481-3 du code de l’urbanisme).

L’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme peut désormais mettre en demeure l’intéressé ayant réalisé des travaux irréguliers de les régulariser dans un délai qu’elle détermine.

Cette mise en demeure ne peut intervenir qu’après qu’un procès-verbal d’infraction ait été dressé et après que l’intéressé ait été invité à présenter ses observations (article L.481-1 I. du code de l’urbanisme).

Elle peut être assortie d’une astreinte d’un montant maximal de 500 € par jour de retard, dès l’origine, ou à tout moment après l’expiration du délai imparti par la mise en demeure s’il n’y a pas été satisfait. Dans ce dernier cas, l’intéressé doit de nouveau être invité à présenter ses observations. Le montant total des sommes résultant de l’astreinte ne pouvant excéder 25 000 € (article L.481-1 III. du code de l’urbanisme).

Le Conseil d’Etat avait déjà précisé que ce mécanisme s’applique à toutes les “opérations soumises à permis de construire, permis d’aménager, permis de démolir ou déclaration préalable ou dispensées, à titre dérogatoire, d’une telle formalité et qui auraient été entreprises ou exécutées irrégulièrement”, incluant les changements de destination (CE, 21 septembre 2023, Ville de Paris, n°470176).

Il avait également jugé que ce mécanisme, qui a pour objet de rétablir les lieux dans leur situation antérieure aux travaux réalisés irrégulièrement, n’a pas le caractère de sanction et n’est donc pas soumis aux principes d’indépendance, d’impartialité, ni aux principes afférents à l’exercice des droits de la défense (CE, 21 septembre 2023, Ville de Paris, n°470176 ; CE, 13 décembre 2023, commune de Champagne-au-Mont-d’Or, n°488749).

Le Conseil d’Etat a de plus refusé de transmettre plusieurs QPC questionnant la conformité de l’article L.481-1 du code de l’urbanisme aux droits et libertés que la Constitution garantit pour défaut de caractère sérieux :

    par rapport au principe de liberté d’entreprendre (CE, 21 septembre 2023,
    Ville de Paris
    ,
    n°470176
    ) ;au droit de propriété et à l’étendue de la compétence législative (CE, 13 décembre 2023,
    commune de Champagne-au-Mont-d’Or
    ,
    n°470176
    ) ;au droit de propriété et à l’étendue de la compétence législative (CE, 13 décembre 2023,
    n°488749
    ).
    n°488749
    ).
La mise en conformité peut se traduire par une démolition

Selon les cas, la régularisation prescrite par la mise en demeure se traduit, soit par le dépôt d’une demande d’autorisation d’urbanisme, soit par les opérations nécessaires à la mise en conformité des travaux.

Lorsque seule la démolition permet la régularisation, cette mesure peut donc bien être prescrite (CE, 22 décembre 2022, commune de Villeneuve-lès-Maguelone, n°463331).

La condition d’urgence est présumée pour le propriétaire


Le Conseil d’Etat juge au sujet de la démolition que, lorsque la mise en demeure prescrit une mise en conformité impliquant nécessairement la démolition de constructions, la condition d’urgence est présumée satisfaite en cas de référé suspension introduit par le propriétaire :

(…) 3. Eu égard à la gravité des conséquences qu’emporte une mise en demeure, prononcée en application de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme, lorsqu’elle prescrit une mise en conformité qui implique nécessairement la démolition de constructions, la condition d’urgence est en principe satisfaite en cas de demande de suspension de son exécution présentée, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, par le propriétaire de l’immeuble qui en est l’objet. Il ne peut en aller autrement que dans le cas où l’autorité administrative justifie de circonstances particulières faisant apparaître, soit que l’exécution de la mesure de démolition n’affecterait pas gravement la situation du propriétaire, soit qu’un intérêt public s’attache à l’exécution rapide de cette mesure.(…) ” (CE, 11 décembre 2023, SCI Brunetière, n°470207, Lebon T).

Cette présomption peut toutefois être renversée si l’administration justifie de circonstances particulières et démontre :

    soit que l’exécution de la mesure de démolition n’affecterait pas gravement la situation du propriétaire ;soit qu’un intérêt public s’attache à l’exécution rapide de cette mesure.

Cette solution rejoint celle déjà adoptée s’agissant des démolitions prescrites dans le cadre d’une procédure d’insalubrité (CE, 18 novembre 2009, société La Méridionale des Bois et Matériaux, n°327909).

Les collectivités souhaitant utiliser ce mécanisme doivent donc veiller à bien respecter toutes les conditions de procédure et de fond prévues par l’article L.481-1 du code de l’urbanisme. Un cas de non respect, les intéressés peuvent se tourner vers le référé suspension pour obtenir une suspension de l’exécution de la mise en demeure et éviter, notamment, de se voir infliger une astreinte.

Vous souhaitez échanger ?
Vous souhaitez échanger ?
ressources

Nos dernières
ressources

Nos ressources
Nos ressources
Nous utilisons des Cookies pour mesurer l'audience de notre site internet. Vous pouvez vous opposer aux traitements basés sur l'intérêt légitime à tout moment en cliquant sur 'Refuser'. Pour plus d'informations : Politique de confidentialité