Le Conseil d’Etat juge que l’accomplissement de formalités requises pour obtenir une autorisation d’urbanisme ne suffit pas à régulariser l’autorisation initiale en l’absence d’autorisation modificative (CE, 5 novembre 2024, société Gély, n°470578).
Le permis de construire modificatif et la régularisation
Lorsqu’un permis de construire a été délivré malgré sa non-conformité à une ou plusieurs règles d’urbanisme, le pétitionnaire bénéfice de très larges possibilités de régularisation.
Il est en effet constant qu’un permis de construire non conforme aux règles d’urbanisme peut être régularisé par la délivrance d’un permis de construire modificatif (CE, 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, n°238315).
Cette régularisation peut être faite spontanément par le bénéficiaire, par exemple suite à l’introduction d’un contentieux, ou bien dans le cadre d’un sursis à statuer prévu par l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme.
Les possibilités de régularisation sont importantes, tous les vices pouvant être régularisés (incompétence, vice de procédure, erreur de droit…).
Encore plus, la régularisation d’un permis initial par un permis modificatif peut résulter de l’évolution des règles d’urbanisme méconnues. Il est donc possible de faire évoluer les règles d’urbanisme méconnues, après délivrance du permis initial, afin d’assurer la conformité du projet à ces règles d’urbanisme (CE, 7 mars 2018, Mme Bloch, n°404079).
Le Conseil d’Etat est même allé plus loin en jugeant que le permis initial peut être régularisé par un permis modificatif si la règle d’urbanisme méconnue ne l’est plus en raison d’un changement dans les circonstances de fait (CE, 10 octobre 2022, Société Territoires Soixante-Deux, n°451530 – voir notre article à ce sujet).
Ce que rappelle le Conseil d’Etat au cas présent :
“ (…) 3. Lorsqu’une autorisation d’urbanisme est entachée d’incompétence, qu’elle a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l’autorisation, l’illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d’une autorisation modificative dès lors que celle-ci est compétemment accordée pour le projet en cause, qu’elle assure le respect des règles de fond applicables à ce projet, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Elle peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l’utilisation du sol qui était méconnue par l’autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l’effet d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce. (…)” (CE, 5 novembre 2024, société Gély, n°470578).
Pas de régularisation sans autorisation de régularisation
Le Conseil d’Etat exige qu’une autorisation de régularisation soit délivrée pour que la régularisation ait bien lieu.
Autrement dit, la seule évolution de circonstances de faits ou des règles applicables à un projet ne suffit pas à régulariser une autorisation illégale.
Un permis de construire modificatif est toujours nécessaire.
Il en va de même si des formalités requises pour obtenir une autorisation d’urbanisme n’avaient pas été accomplies.
Le Conseil d’Etat précise ainsi que la seule circonstance que des formalités qui s’imposaient au stade du permis de construire et qui n’ont pas été accomplies le soient par la suite n’est pas susceptible de régulariser le permis de construire en l’absence de toute autorisation modificative :
“ (…) En revanche, la seule circonstance que le vice dont est affectée l’autorisation initiale et qui a justifié le sursis à statuer résulte de l’omission ou de l’irrégularité de formalités qui, à la date à laquelle le juge statue à nouveau sur la demande d’annulation, après l’expiration du délai imparti aux intéressés pour notifier la mesure de régularisation, ont été désormais satisfaites, est insusceptible, par elle-même, d’entraîner une telle régularisation en l’absence de toute délivrance d’une autorisation modificative. (…)” (CE, 5 novembre 2024, société Gély, n°470578).
Conclusion
Le Conseil d’Etat confirme que le seul écoulement du temps ou même l’accomplissement de formalités ne suffit pas à régulariser une illégalité.
Une autorisation modificative doit avoir été été délivrée pour corriger l’illégalité et que joue la régularisation à la date où le juge statue sur la légalité de l’autorisation d’urbanisme.